Comment les lieux familiers se superposent et nous possèdent

Mes par­ents vivent à une trentaine de km de Mar­seille main­tenant, après 30 ans passés dans le 8ème arrondisse­ment près de la mer, du parc Pas­tré et du lycée Mar­seilleveyre. Ils sont par­tis sans regrets — nous n’aimions pas beau­coup ce “petit apparte­ment à l’hor­i­zon­tal” à qui j’en­voy­ais des let­tres.

***

L’actuelle mai­son n’est pas telle­ment plus grande ; il n’y a pas d’é­tage, con­traire­ment à l’an­ci­enne ; elle est juste posée (“on peut dire qu’on est au vert”), comme un oiseau immo­bile sur un ciel clos.

***

et je me demandais en me douchant, avec ses nou­veaux murs, son por­tail et ses fron­tières de plantes qui du jardin ou de la mai­son entoure l’autre.

***

Avant d’aller se couch­er, à moitié endormie sur le canapé devant la télé, il arrive à ma mère de dire : “oui oui je monte me couch­er”. Moi-même je me sur­prends à me lever pour aller fer­mer sa toute petite cham­bre d’ap­point fraîche­ment amé­nagée, quand le son est trop fort, répliquée sur le mod­èle de l’an­ci­enne ; mais sans porte.

***

C’est une unité d’empiètement : elle s’ac­croît comme un jeune géant, s’é­tend, s’é­coule d’un lieu à l’autre.

***

Nous pen­sions l’avoir facile­ment quit­tée mais elle se rap­pelle tous les jours à nous — la petite mai­son tant méprisée résiste à l’ou­bli ; à la nég­li­gence de ses anciens occu­pants : car nous n’en étions pas les pro­prié­taires ; c’est elle qui nous pos­sé­dait.