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NISO et InternetArchive ont récemment chargé un groupe d’experts de réfléchir à une standardisation des annotations, de manière à ce qu’elles circulent plus facilement d’une application à une autre. C’est qu’aujourd’hui, une annotation produite à partir d’un dispositif propriétaire reste captive : elle ne peut pas circuler.
Spatialisation, coordonnées…
Les possibilités de cette circulation posent d’autres problèmes, qui ne sont pas seulement juridiques ou économiques. Le texte numérique, en constante évolution, perturbe en effet la stabilité de nos références et de leur emplacement. Qu’un texte soit mis à jour par exemple et les coordonnées de ses paragraphes s’en trouvent modifiées : comment, dès lors, peut-on encore espérer s’assurer que l’url d’une annotation, qui a circulé du texte-application à un réseau “social” (Facebook, Twitter, etc.), soit encore valide à la prochaine mise à jour du texte dont elle est issue ?
Hadrien Gardeur qui faisait partie de cette importante initiative a rendu compte sur Google + des préconisations formulées par son groupe de travail (on se reportera également à la synthèse de Peter Brantley). Sa présentation mentionne bien tous les problèmes évoqués en précisant “qu’ils pourraient être étendus à l’infini”. L’un d’entre eux a retenu l’attention de tous les membres : celui du pointage, de la possibilité de renvoyer une annotation — qui aurait circulé — à son texte d’origine.
Deux types de lien
L’un des intervenants (Bill McCoy de l’IDPF), résume Hadrien, a commencé sa présentation en évoquant l’importance d’avoir deux types de lien :
- Un lien fort capable de pointer très précisément vers le texte d’où provient l’annotation et susceptible, par conséquent, d’être grandement affecté par une mise à jour du texte. Une spécification pour les livres formatés en ePub 3 a ainsi été mise en place (Canonical Fragment Identifier) ;
- Un lien faible, plus flexible, qui ne renverrait certes pas avec précision au texte mais qui serait alors moins perturbé par ses modifications.
Problèmes à régler
Pour améliorer les spécifications de ces liens, le groupe devra entre autres travailler sur d’autres éléments :
- la possibilité de les trier facilement ;
- la possibilité de pointer une annotation vers une image, un fichier audio, une vidéo ;
- l’identification du nombre de caractères d’un texte (faut-il compter les blancs ? les éléments XML comme des caractères ? Quelle unité de mesure ? Le % ?) ;
- l’harmonisation des pratiques (certains dispositifs sauvegardent en effet le texte d’un utilisateur avant qu’il soit souligné, d’autres après, etc.)
- le prise en compte de standards de référencement séculaires (séquençage biblique)
Associer le contexte aux liens
On voit ainsi bien qu’il n’existe pas de solutions idéales. La place du lecteur pourrait cependant être fondamentale. Aaaron Miller du projet ReadSocial a plaidé pour des annotations générées avec des métadonnées, c’est-à-dire avec un ensemble d’éléments qui préciseraient d’où elles viennent, de quel placement, voire peut-être (si j’étends la réflexion) de quelles MAJ/éditions. Au lecteur de s’y référer, de comprendre qu’une annotation est un instantané, pris dans un carrefour instable, et de faire lui-même cette chaîne de liaisons.
Les liens faibles/forts pourraient ainsi être doublés/consolidés par des métadonnées et un contexte qui permettent au lecteur de situer l’annotation/de s’y référer et ce, même si les liens disparaissent. C’est la pérennité du savoir qui est en jeu et la possibilité de retrouver une source, quand bien même l’opération de transmission serait défaillante.
Et après ?
Ces sessions n’étaient qu’une première étape. Le groupe a défini des priorités et mesuré le taux d’investissement des différents acteurs en présence (ReadMill, Kobo, Barnes & Noble, etc.). Janvier 2012 s’annonce comme le lancement officiel des travaux et juin comme la mise en place progressive de la spécification.
Ces travaux semblent aller dans le bon sens. Reconnaître les difficultés liées à l’annotation et l’impossibilité de trouver une solution idéale, c’est en effet tenter de comprendre sa nature et inclure progressivement un ensemble d’acteurs et d’entités qui participent de son écologie.